Dans le cadre de la série d’entrevues, portrait des formateurs de la formation Leader en transformation numérique, découvrez une de nos formatrices de la formation!

 

Entrevue entre Louis-Nicolas Robert (LNR), conseiller en formation aux entreprises à Cégeps et Cies, Capitale-Nationale et Corinne Chabot (CC), agente de recherche chez Investissement Québec – CRIQ.

Question 1 (LNR) : On entend à l’occasion des directeurs généraux dire: ‘’J’ai fait un plan stratégique, un plan de communication, un plan de commercialisation. Ça m’a coûté cher et rien n’a été fait. En tant que directeur général, c’est entièrement ma faute, je sais. Je ne veux pas me faire un plan de transformation numérique écrit par des consultants et qui restera sur les tablettes, encore une fois.’’

Réponse (CC) – La transformation numérique doit être planifiée et réalisée par l’entreprise en fonction de ses objectifs d’affaires. Évidemment, l’entreprise peut se faire accompagner par différents intervenants externes et une collaboration avec l’externe est généralement recommandée. Toutefois, l’entreprise doit assurer la gouvernance de sa transformation numérique. En ce sens, elle doit réfléchir aux orientations et aux objectifs qui vont guider sa démarche. Elle doit s’impliquer dans la priorisation des différentes opportunités, et elle doit mettre en place une équipe dont le rôle sera d’assurer la transformation. Elle doit assurer sa capacité à mettre en œuvre celle-ci (en termes de compétences, notamment, de structure organisationnelle, d’engagement, etc.)

Question 2 (LNR) :  Pour une entreprise, c’est tout un défi d’accepter un accompagnement. Il faut s’assurer que l’accompagnement fera émerger des besoins réels de l’entreprise. On voit trop souvent de l’accompagnement qui se transforme en vente de solution toute faite. Avez-vous des conseils à donner aux entreprises pour qu’elles ne tombent pas dans le panneau?

Réponse (CC) : L’accompagnement devrait être neutre et impartial, minimalement jusqu’à ce qu’une solution soit sélectionnée, et ce, afin de s’assurer que les besoins et les objectifs d’affaires soient considérés sans autres égards. Idéalement, cet accompagnement devrait impliquer une collaboration active et relativement importante de l’entreprise. Cette dernière devrait pouvoir bénéficier d’un certain apprentissage (par exemple : les bonnes pratiques en gestion de la transformation numérique, comment prioriser des projets, les avantages et inconvénients entre différents scénarios, les grandes étapes d’une sélection logicielle, la planification d’un projet de données, etc.). L’accompagnement ne devrait pas imposer de scénarios ou de solutions, mais permettre à l’entreprise d’être en mesure de faire le meilleur choix, en ayant toute l’information nécessaire et une bonne compréhension de celle-ci. Un bon accompagnement permettra à l’entreprise de grandir et d’être confiante dans ses choix et son plan de transformation numérique. Cela étant dit, une fois que l’entreprise se trouve dans la phase d’implantation d’une solution, il est pertinent de collaborer avec des ressources qui ont une grande connaissance de la solution en question. On cherchera davantage un « spécialiste » qu’un « coach ».

Question 3 (LNR) : Que répondez-vous à ceux qui ont eu une mauvaise expérience, comme ce directeur général : ‘’Mon directeur T.I. m’a convaincu de dépenser 150 000$ dans un logiciel de gestion des clients (CRM) et l’implantation a été difficile dans l’entreprise, personne ne l’a utilisé. Si c’est ça, la transformation numérique ? C’est NON, plus jamais’’.

Réponse (CC) : C’est malheureusement une situation qui arrive trop fréquemment et qu’on doit essayer d’éviter ou de ne pas reproduire. Pour cela, il est important de s’intéresser à la cause de cet échec : de quels besoins émanait cette initiative? Quels étaient les objectifs de départ? Est-ce que l’ensemble des parties prenantes était en accord avec ceux-ci? Est-ce que les besoins à moyen terme ont été entrevus?  Est-ce que les utilisateurs avaient été mis au fait de cette initiative? Ont-ils été impliqués dans le processus de prise de besoin? Est-ce que les processus impliqués ont été revus? Y avait-il une réticence face au changement? Comment la solution a-t-elle été sélectionnée? Etc.

Question 4 (LNR) : Votre réponse est très stratégique et elle tient en compte de toutes les dimensions de l’entreprise y compris l’aspect de ressource humaine. À première vue, c’est étonnant d’entendre quelqu’un qui travaille en recherche appliquée tenir compte de la réticence aux changements et d’accorder du poids à la dimension humaine du changement. Avez-vous toujours eu ce type d’approche ou c’est le fruit de votre expérience au fil du temps?

Réponse (CC) : Un peu des deux. J’ai toujours eu la conscience, même lors de mes débuts en conception et développement de logiciels, de m’assurer que la solution devait répondre à un besoin et soulager l’humain dans ses fonctions. En ce sens, j’ai toujours accordé une grande importance à la compréhension des besoins des différents utilisateurs, à leur implication très tôt dans le processus de conception et à leur rétroaction. Toutefois, je dois également vous avouer que l’expérience m’a démontré qu’une solution non acceptée résulte généralement en une solution non utilisée.  Résultat : la solution sera tout aussi inutile qu’une solution non fonctionnelle.

Plusieurs raisons font en sorte qu’une solution ne sera pas acceptée : des échecs répétés dans différentes initiatives, des lacunes au niveau de l’implication des ressources, une priorisation de l’aspect « fonctionnel » d’une solution en dépit de l’aspect « exploitable », etc. Dans tous les cas, il faut s’assurer d’obtenir l’engagement des personnes impliquées. Trop souvent, il est imaginé que les ressources devront s’habituer et utiliser la solution. L’humain étant ce qu’il est, il aura une bien meilleure ouverture quant à l’utilisation d’une solution pour laquelle il aura été impliqué dans différents stades des processus de sélection et de déploiement, et s’il comprend les raisons des différents choix qui ont amené à l’état final du projet. De plus, l’humain a besoin de comprendre la valeur ajoutée de ce qu’il effectue. Personne n’aime perdre du temps à faire quelque chose qui n’a pas de valeur à ses yeux. Dans ce dernier cas, l’humain cherchera à se faciliter la vie, en se développant des outils parallèles, plus efficaces pour lui. Malheureusement, ces derniers sont généralement non uniformes et apportent un frein dans l’atteinte d’un niveau de maturité numérique plus élevé. Cela s’observe notamment, par des lacunes en termes de collaboration entre les processus, des données éparses entre les systèmes, l’absence de certaines données, la centralisation des connaissances vers des ressources clés, etc.

Question 5 (LNR) :  Quelle est la plus grande lacune en matière de transformation numérique pour les PME québécoises?

La limitation au niveau des connaissances et des compétences en matière de numérique. Il est difficile pour certaines entreprises d’imaginer comment le numérique pourrait apporter des solutions à leurs problèmes (ou quels problèmes pourraient trouver une solution par le numérique). L’offre du marché en termes de solutions est très large et souvent méconnue. Les compétences pour implanter les différentes solutions restent limitées dans certains cas (internes ou externes).

Questions 6 (LNR): Vous venez d’évoquer les compétences. Quelles devraient être les compétences prioritaires pour débuter une transformation numérique?

Réponse (CC) : En fait, j’aborderais le sujet des connaissances dans un premier temps, plutôt que celui des compétences. Selon moi, les connaissances prioritaires à avoir sont :

  • Les types de problématiques qui peuvent se résoudre par une solution numérique.
  • Les grandes familles de solutions numériques sur le marché, les types de fonctionnalités offertes par ces solutions et les problématiques qui pourraient être adressées par celles-ci.
  • Éventuellement, les avancées technologiques en matière de technologie d’information/technologie opérationnelle et les problématiques qu’elles peuvent adresser.

Évidemment, ces connaissances seront plus ou moins approfondies selon le rôle des ressources de l’entreprise et le niveau de maturité numérique. La compétence résultante devrait être la suivante : être en mesure de cibler les opportunités d’amélioration avec son contexte d’entreprise, pour ensuite avoir une idée des pistes de solutions qui seraient en mesure de les adresser. Cette compétence permettra de répondre à la fameuse question que plusieurs entreprises se posent : par où devrais-je commencer ? Elle permettra d’identifier les autres compétences afin d’aller plus loin dans la démarche, internes ou externes.

Enfin, des compétences en gestion de portfolio de projets technologiques, en gestion de projets technologiques et en gestion du changement, proportionnel à la taille de l’entreprise, sont également de mise.

Question 7 (LNR) : En conclusion Corinne, pourquoi vous nous conseillez de suivre la formation Leader en transformation numérique ?

Réponse (CC) La formation (de 56 heures en 8 modules de 7 heures) permet d’acquérir plusieurs connaissances et compétences pour bien entamer sa transformation numérique, dont celles prioritaires. Elle permet au participant de comprendre le rôle du leader en transformation numérique et fournit les outils de base afin de s’approprier ce rôle, et ce, en considérant tous les aspects d’une démarche de transformation numérique tels que l’alignement stratégique, la gestion du changement, la gestion du portfolio, le pilotage des projets, la révision des processus, en plus des notions technologiques nécessaires pour avoir une meilleure vue du potentiel des différentes solutions numériques, des écueils à éviter et des outils disponibles sur le marché.